29 août 2012

Interview par Eva Bester, France-Inter, 30 août 2012


Source

Interview par Shlomo Malka sur RCJ

Source

The DSK affair is the incarnation of contemporary folly, AFP

Strauss-Kahn sex scandal continues to fascinate

PARIS, Aug 29, 2012
-Dominique Strauss-Kahn may have disappeared from public life but his spectacular and sordid fall from grace is being played out again and again in books, plays, TV shows and movies.
The six-minute sexual encounter between the man who might have been France's next president and a maid in a swanky Manhattan hotel continues to fascinate long after the story fell off the front pages of newspapers.
"The DSK affair is the incarnation of contemporary folly," said novelist Stephane Zagdanski, using the initials by which the former head of the International Monetary Fund is best known in France.
"It fascinates enormously because he was at the summit of the world and he found himself in the gutter overnight, thanks to a six-minute fellatio," he told AFP.

28 août 2012

Yannick Haenel à Stéphane Zagdanski, 15 août 2012

La dernière nervure
 
Cher Stéphane, ton Chaos brûlant met en plein dans la cible, avec une effervescence drôlatique et une profondeur de vue qui laissent augurer des ravages que le livre va opérer dès sa sortie. Formuler le sinistre, en faire une sarabande magique, comme dans La Tempête de Shakespeare ; retourner le diable sur lui-même afin d'y voir grâce à lui ; déshabiller la fabrique de Satan. Ce qui est très fort, c'est que tu rapportes le dispositif de la folie planétaire à l'inanité foireuse d'un acte sexuel surcommenté : le monde se fait imploser à travers un coït douteux. Le monde de la finance, et l'extraordinaire généalogie de la servitude et du crime qui l'accompagne, et que tu mets en évidence, repose autant sur du vide que le rapport sexuel. Spéculation libidinale, d'autant que l'argent lui-même n'est rien que le signe de la dépossession en acte. L'unique vérité de la convulsion économique permanente — de son soubresaut, de son tic —, c'est la jouissance, ou plutôt son ratage, son absence délirée — son fonctionnement vide. Il n'y a même plus d'assise métaphysique, de type apocalyptique : le Gouffre lui-même est devenu une marchandise.


Le livre, dans son déploiement, met en évidence combien les humains et l'humanité n'existent plus : tu déchiquettes cette croyance en l'"homme". Le monde retarde, c'est pourquoi sa représentation à travers la psychose est une trouvaille : quand l'"Algorithme", comme tu dis, a épongé la substance entière du globe, eh bien l'extermination a fait un tour sur elle-même, replaçant le nazisme dans une autre histoire, celle de l'économie ; et dans sa vrille, la dimension actuelle du crime — la finance — en saturant l'économie, la détruit (et avec elle les petites choses qui s'accrochent à la circulation de l'argent, et qu'on appelle encore des humains). Très grande lucidité terrible, donc, à propos de ce règne sans âme. Comme tu le rappelles : Nel peggio non c'è fine. J'aime beaucoup les pages sur l'écroulement d'un iceberg, qui s'appellent "Flambées" : selon moi, c'est le centre secret du livre, sa métaphore, celle qui dévoile une noblesse invisible. Le destin de la banquise est ce qui arrive à chaque corps.  


Grande intuition de DSK surendetté à son propre destin, à qui les mots ne coûtent rien — infirme de la parole. D'Anne Sinclair ratant son être en repoussant Picasso. Et les pages sur la "vraie prière", dans la chambre à gaz, m'ont beaucoup parlé. C'est évidemment un livre sur le TORT qui t'a été fait, à toi et à ta famille. Tort qui ne vient pas seulement des nazis, mais d'une extermination qui, chaque jour, s'avère élargie au mécanisme même du monde, et prend sa place. L'indemne, alors, n'est plus qu'une nervure, par laquelle tu glisses ton livre.

Ton ami, qui te serre la main,

Yannick

Reproduit  avec l'aimable autorisation de Yannick Haenel

Feuilleter les 24 premières pages de Chaos brûlant

PREMIERES PAGES

Un roman brillant et tragique, Philippe Vallet, France-Info

Un pavé dans la mare de la rentrée littéraire, Toute la culture

Le talentueux essayiste et romancier Stéphane Zagdanski (La Mort dans l’œil, Pauvre de Gaulle) se penche avec un an de recule sur la fameuse affaire DSK. Vus à travers les yeux extra-lucide d’un psychotique tatoué interné dans un hôpital de New-York, les évènements du 14 mai 2011 et les deux mois qui ont suivi prennent un relief tragi-comique. Un pavé dans la mare de la rentrée littéraire 2012 en librairies depuis le 23 août 2012.
Surnommé « Sac d’os » pour sa maigreur maladive, tatoué partout, le narrateur de « Chaos brûlant » est un psychotique intellectuellement supérieur et capable de se glisser dans la tête de ses interlocuteurs. La médiatisation des évènements qui ont eu lieu le 14 mai 2011 dans la suite 2806 l’interpellent, et il se glisse à la fois dans la psychologie de DSK, de la mystérieuse Nafissatou Diallo, de Anne Sinclair, de l’avocat de DSK Benjamin Brafman, du procureur et aussi de personnages imaginaires comme son touchant et sage gardien de cellule à Rikers Island…
Très documenté, extrêmement bien écrit et tentant l’expérience de se glisser dans la peau de chacun des personnages qui ont été sous les feux des médias fascinés par cette affaire, « Chaos brûlant » soumet des hypothèses psychologiques à temps intéressantes : Que Zagdanski se penche vraiment sur la vision du monde de Nafissatou Diallo est plutôt original et sympathique même si parfois un peu cliché. Mais la charge contre un DSK survivant d’un tremblement de terre dans l’enfance et totalement insensible et conquérant depuis est trop caricaturale et trop souvent répétée pour tenir le lecteur vraiment en haleine sur plus de 416 pages. Chaos Calme » était un roman bien parti pour saisir divers souffle de l’esprit du temps et qui finit en galerie de personnages figés. Dommage…
Stéphane Zagdanski, « Chaos brulant », Seuil, 416 pages, 21 euros. Sortie le 23 août 2012.


27 août 2012

Flambées




"À Nuuk, la capitale du Groenland, les hères inuits édentés, obèses, myopes, alcooliques et désœuvrés, vivent dans des HLM décolorées en tôle ondulée aux vitres brisées. Ils regardent d’un air sauvage et apeuré l’agitation du port industriel, adossés au mur d’un hangar. Il y a quelque chose de pourri au royaume de la Neige. Ce sont les hangards." 
Extrait de Chaos brûlant

Marianne Interview about Chaos brûlant (Burning chaos)



Marianne: Why does the DSK Affair still fascinate to such an extent?

Stéphane Zagdanski: Probably because on May 14, 2011, DSK became, in spite of himself, the symbol of the insanity of the contemporary world.  A polymorphous madness, become “globalised,” as it is said, with its political derangements, its media deliriums or “economic horrors,” to quote Rimbaud, in which we all—without exception—flounder about at this very moment.  The at once lunatic and exemplary character of the Sofitel incident was clear to me when I learned that the media covered with which it had been favored surpassed coverage of September 11, 2001.

26 août 2012

DSK, une affaire littéraire, Aude Lancelin dans Marianne





Two Interviews With Stéphane Zagdanski about his new novel Chaos brûlant ( "Burning Chaos" )

Olivier Simon :  What is Chaos brûlant [Burning Chaos]?  A novel?  A fiction? An essay?

Stéphane ZagdanskiChaos brûlant is a novel, a genuine novel.  All of it is invented.  I could even say that the novel’s common thread, that is the DSK Affair, itself is invented, since it is re-elaborated by the mind of the narrator, who is a psychotic with the peculiar ability to see, or to believe that he sees, what people think, without their knowing it.

22 août 2012

DSK: une sexualité aliénée, MyBOOX




MyBOOX: Qu’est-ce que Chaos brûlant ? Un roman ? Une fiction ? Un essai ?

Stéphane Zagdanski :
Chaos brûlant est un véritable roman. Tout en est inventé, je pourrais même dire que le fil rouge du roman, à savoir l’affaire DSK elle-même, est inventée puisqu’elle est réélaborée depuis le cerveau du narrateur, un psychotique ayant la particularité de deviner, ou de croire qu’il devine, ce que pensent les gens à leur propre insu.

17 août 2012

DSK est une version appauvrie et grotesque du Roi Lear, France-Amérique


 1. L'affaire DSK est encore présente dans tous les esprits. A quel moment, et pourquoi, s'est-elle imposée à vous comme un matériau propre à constituer le point de départ d'un roman ?

Je guettais depuis longtemps l’occasion de rédiger une FMI, une « Fiction Métaphysique Instantanée » – un roman en direct interprétant minutieusement quelque fait divers crapuleux emblématique de notre temps. Je prévoyais aussi de consacrer un roman à l’argent, plus précisément aux ravages spirituels de sa transmutation financière. Très vite, vers la fin mai 2011, la déflagration de l’affaire DSK m’est apparue comme le prétexte idéal d’un tel roman. Tous les symptômes de l’effondrement de la civilisation occidentale s’y trouvent fusionnés dans la tragi-comédie d’un seul homme : une absurde sexualité machinale dissociée de tout raffinement langagier (on est aux antipodes de l’univers de Sade) ; une cécité existentielle maladive, propre de l’arrogante oligarchie qui mène la planète à sa ruine ; l’hypertrophie médiatique s’alimentant de son propre vide, dont l’abîme d’impensé occupe tout l’espace de la représentation et du commentaire ; la criminelle impotence politique accoutrée sous les oripeaux publicitaires de la communication la plus impudemment débile…

16 août 2012

Séismes


"Le ciel bleu était infernal de pureté, le soleil si blanc et brûlant qu’il semblait vouloir enfouir sous la chaux tout ce qui n’était pas lui. Les rues et les avenues, étrangement, étaient d’une tenue impeccable, comme si les décombres avaient pris soin de ne pas déborder sur les artères pour faciliter la déambulation estomaquée des survivants. À chaque pas un nouveau témoignage de la friabilité des constructions humaines surgissait, pour aussitôt s’applatir en une obséquieuse révérence au ravage."
Extrait de Chaos brûlant

13 août 2012

La trouée


"Un soir, j’étais en train de dévorer une aventure de Daredevil, mon héros préféré, quand le miracle arriva. Je ne parvins plus à lire les légendes ni à distinguer les infimes détails des dessins – tel le filin caché de la canne blanche de Matt Murdock quand il la transforme en nunchaku… Tout enflait, oscillait, ondulait, respirait… Je tapotai sur ma lampe de poche mais les piles étaient neuves. C’étaient mes yeux qui s’étaient éteints ! Ma mère allait être exaucée, soulagée, je les avais enfin usés,  j’étais en train de devenir aveugle ! Daredevil m’avait inoculé son handicap. J’étais sauvé." 
Extrait de Chaos brûlant

1 août 2012

Grignotages


"Homer est littéralement devenu ce qu’il consomme. Ce qu’il consomme, ce n’est pas de la nourriture mais sa réclame, la reproduction falsifiée d’ersatz élaborés dans des éprouvettes. Traité comme un container à déchet par la propagande agro-alimentaire depuis son enfance, Homer s’est métamorphosé en sa propre déjection, exproprié de son corps au profit de toutes les publicités de nutritions surnaturelles diffusées nuit et jour sur tous les postes de télévision. Le corps martyr de Homer est imprégné d’images abjectes et désirables, huileuses et trafiquées, fondantes et plastifiées, suppurantes de calories, glorieuses de graisse, éclaboussantes de dépendance, rutilantes de volonté abolie."
Extrait de Chaos brûlant